Publié le Laisser un commentaire

L’homme sous le marronnier

J’écris et je vous offre gratuitement ces petites histoires. Mais, si après votre lecture cela vous a plu et que vous souhaitez me soutenir.
N’hésitez pas, cliquez ici pour me faire un petit don de la somme de votre choix. Merci !



Ou visionnez un petite vidéo sur UTIP (ici) ça ne vous coûte rien, mais ça me rapporte un peu. 🙂 


Elle lui dit au revoir un matin d’hiver, sur le quai d’une gare froide et sale.
Elle lui donna un dernier baiser, il la serra dans ses bras. Puis il courut monter dans son train.
Elle resta un instant sur le quai pour le regarder s’éloigner. Son cœur se serra et une larme coula sur sa joue sans même qu’elle ne s’en rende compte.

À cet instant, elle ne savait pas encore que lorsqu’elle le reverrait tout serait complètement différent.

Elle quitta la gare et rentra chez elle. Elle occupa le reste de la journée à faire du ménage et du rangement dans la maison, afin de ne pas penser au fait qu’elle était à présent seule dans cette grande demeure.

La nuit venue, elle s’endormit seule dans un lit qui lui parut glacé et trop grand.

C’est seulement au petit matin, que la sonnerie de son portable posé sur la table de chevet, la réveilla.

Elle ne comprit pas tout de suite son interlocuteur. Ou du moins, son cerveau faisait mine de ne rien comprendre, peut-être pour se protéger.

Mais même avec la meilleure protection du monde, elle allait souffrir de cet appel matinal.

Effectivement, dès qu’elle raccrocha son téléphone, elle se mit à pleurer. Puis, elle se calma un peu, reprit sa respiration, fixa le cadre photo posé sur l’étagère à l’autre bout de la pièce, se leva, l’attrapa et l’explosa contre le mur.

Elle regarda longuement les débris de verre et la photo à terre. C’était une photo d’Elle et Lui, posant tout sourire devant la maison le jour de leur emménagement, il y a un an.

Soudain, les mots douloureux qu’elle venait d’entendre au téléphone lui revinrent à l’esprit :

« Je suis désolé mais je ne rentrerai pas. Ni dans trois jours, ni jamais. Je crois que c’est mieux ainsi ».

Elle sentit alors sa gorge se nouer à nouveau, mais elle se ressaisit rapidement. Elle empoigna la photo et la serra contre elle tout en fermant les yeux.

Puis, elle sortit précipitamment de la chambre et dévala l’escalier pour descendre à la cuisine, toujours en tenant fermement la photo comme s’il s’agissait du trésor le plus précieux au monde.

Arrivée dans cette grande pièce claire qui sentait le café qui avait déjà coulé dans la cafetière programmable dont il lui avait fait cadeau il y a deux mois, elle ouvrit le tiroir à couverts et en sortit de gros ciseaux de cuisine. C’est alors, qu’elle se mit à découper la photo. Elle découpa seulement le contour de sa silhouette à Lui, de sorte qu’à la fin cela représente simplement une photo de Lui.

Après cela, elle rangea la silhouette photo dans la poche de son pyjama et sortit dans le jardin. Elle alla dans la remise chercher une pelle et creusa un petit trou sous le marronnier près du portail. Là, elle y enterra la photo et rentra boire son café comme si de rien n’était.

Le temps et les jours passèrent ainsi, elle continua de poursuivre la routine de sa vie et ne laissait rien transparaître.

Jusqu’à ce fameux soir où l’on sonna à sa porte.

C’était Lui. Lui, qui passait sans prévenir pour récupérer ses affaires.

Elle resta un moment devant lui à la porte avant de savoir quoi dire ou quoi faire, puis elle le laissa entrer.

Il tenta de parler, mais elle le coupa de suite pour lui demander de se taire et de se dépêcher de rassembler tout ce qui lui appartenait.

Il s’exécuta. Il se sentait tellement coupable !

Pendant qu’il faisait ce qu’il avait à faire, elle s’était rendue dans le jardin et se tenait debout sous le marronnier où il y avait quelques semaines déjà, elle avait enterré la photo de cet homme qui l’avait fait tant souffrir et qui était maintenant là, à quelques mètres d’elle, dans la maison.

Au bout d’un moment, il ressortit avec un gros carton et un sac sous le bras.

Il la vit.

En revanche, ce qu’il ne vit pas de suite, c’était la pelle qu’elle cachait derrière son dos. Et lorsqu’il s’approcha pour au moins, lui dire au revoir, sans qu’il ait le temps de réagir, elle lui asséna un grand coup de pelle sur la tête !

Il tomba à terre inconscient. Il saignait.

Ce qu’il n’avait pas vu non plus, c’était que pendant qu’il rangeait ses affaires, elle avait rouvert le trou où se trouvait déjà sa photo. Mais cette fois-ci, le trou était bien plus grand et bien plus profond. Il pouvait contenir un corps !

Elle le tira alors par les pieds jusqu’à le faire tomber dans ce nouveau trou. Elle y jeta avec lui son carton et son sac d’affaires personnelles. Puis reboucha le trou.

Il était tard dans la nuit lorsqu’elle rentra enfin. Elle était exténuée et pensa à aller se coucher. Mais avant ça, elle avait une dernière chose à faire. Elle prit dans le tiroir dans son bureau, quelque chose qui ressemblait à un album photos, mais il s’agissait juste d’un très beau carnet dans lequel elle collait juste des photos.

Et là, elle y inséra celle qu’elle avait déterré de sous le marronnier, maintenant que Lui s’y trouvait vraiment.

En dessous de celle-ci, elle écrivit soigneusement : « L’homme sous le marronnier ».

Ensuite, elle feuilleta délicatement les pages précédentes du carnet. Sur chacune d’entre elles, l’on pouvait voir des photos de jeunes hommes et sous chacune, une inscription du genre : « L’homme sous le cerisier » ou encore : « L’homme sous le pommier » …

Tous ces pauvres garçons avaient fini de la même manière que l’homme sous le marronnier.

C’est pour cela, qu’il avait justement décidé de s’éloigner d’elle et de la quitter, après être tombé par hasard sur ce carnet sordide.

Il ne lui avait pas donné de raison valable à cette soudaine séparation, mais elle le savait.
Il ne voulait pas finir comme les autres. Les autres, qui sont enterrés sous les arbres des jardins de toutes les maisons dans lesquelles elle avait vécu avant de le rencontrer Lui.

Elle referma son carnet de « trophées » et sourit. En elle-même elle se dit : « Personne n’a le droit de me faire souffrir, il n’a eu que ce qu’il méritait ! »

Une année passa et elle fit la rencontre d’un autre homme.

Ils emménagèrent très vite à sa demande à Elle, dans une nouvelle maison. Celle-ci ne payait pas de mine, mais la jeune femme fut plus enthousiasmée par le jardin et le prunier qui le dominait, plutôt que par le reste.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *